Sunday, July 25, 2010

De Zénon jusqu´à Cusco

Quand je rencontrais Michel pour une entrevue au mois de septembre dernier à Montréal, ce n´était pas pour parler de Zénon, mais de son travail. Tout semble pourtant nous ramener à Zénon. Ça faisait pas une demie heure qu´on parlait qu´on abordait déjà notre petit village et son centenaire, et qu´on discutait de tout ce qu´il y avait à y célébrer. On parlait personnages importants. On revisitait endroits, petits recoins, rues à famille, histoire de camions et de tracteurs...et on semblait se perdre parmi ces beaux souvenirs. Ce qui était frappant par contre c´est que nous n´avions pas nécessairement vécu au mème moment à Zénon, mais nous pouvions quand mème partager tant de souvenirs communs de notre expérience là-bas. C´était comme si on avait lu deux chapitres différents d´un mème livre : avec des personnages, des lieux et des scénarios similaires...mais différents.
Il y avait tant de belles choses à raconter qu´on se disait que ça valait la peine de vraiment le souligner dans le cadre de cette belle retrouvaille qui allait avoir lieu bientòt chez nous. En tant qu´artistes, en tant qu´artisans, en tant que poètes....en tant que chansonniers...nous sommes le résultat de tout ce mélange de circonstances, de personnages, de couleurs et de mouvement qui ont formé notre village. Marqués par ce petit monde, cet ìlot de solitude où avait pu naìtre notre créativité, nous nous devions de lui faire hommage. C´est tout de mème à Zénon que tout avait commencé.
Travailler en équipe avec Stephan, Véronique, Jean-Sébastien et Michel, c´est un peu apprendre à connaìtre la dynamique intéressante de notre village. Certains y ont vécus, certains s´y sont retrouvés, charmé par une belle zénon parkienne, ou par un simple jeu de circonstances.
J´ai toujours eu l´impression que tout le monde avait un lien avec Zénon, ou finissait par en entendre parler, ou finissait par s´y rendre, ou connaìssait quelqu´un qui y était déjà allé. Je sais pas, mais il me semble qu´on a marqué pas mal de monde... de manière positive j´espère...Mais je suis certaine qu´on a sùrement traumatisé du monde avec nos blagues plates...Faut dire qu´on aime ça rire à Zénon.
Notre équipe, celle du Silo à souvenirs, devait trouver une manière de synthétiser des milliers d´histoires, de personages, et de lieux pour former une oeuvre qui pourrait représenter ce petit monde qui éxiste maintenant depuis plus de 100 ans. Pas facile. On avait tant de choses à se dire! Puis nous sommes allés à Zénon pour tourner un peu de footage, Véronique et moi sommes aussi allés aux écoles. Je n´étais pas allé à Zénon depuis au moins 4 ans, alors ça m´avait vraiment marqué, ce retour aux sources. Nous nous sommes réellement beaucoup amusé à nous promener dans le village et à y retrouver la source de notre inspiration. De plus, les gens du village nous ont accueilli (rien de trop surprenant) avec toute la chaleur et tous les sourires qui font son charme. On nous a prèté conseils, machines, temps etc. pour nous aider, et tout ça avec grand enthousiasme. On sent que les gens du village ont hàte de voir ce que nous allons leur présenter, et pour nous aussi, c´est excitant.

Friday, July 23, 2010

Comment c´est, ce bout du monde d´où tu viens?

Arequipa, Pérou, juillet 2010

Québec?
No.
But from Canada...?
Yep.
...and French?
Yep.
...so where in Canada then?

Bonne question.
On s´fait poser beaucoup de questions en voyage, souvent le mèmes, mais toujours aussi pertinentes, des questions du genre : d´où tu viens toi? et comment c´est, ce bout du monde d´où tu viens?

Au début on s´essaye.
J´habite dans une province qui a un nom que tu ne pourras pas prononcer,
c´est genre moyennement central, quoique si tu parles à un ontarien, apparemment, ça c´est central itou. Ça dépend sùrement de ton point de référence...
C´est hyper plat. Pis y´a beaucoup de champs.
Y´a des gens qui aiment pas ça, mais moi j´aime pareil.
Apprécier la prairie pour moi, c´est comme aimer l´océan.
Les gens des maritimes, y doivent pouvoir aimer ça aussi, la prairie.
Moi j´aime bien l´océan.

Je voyage depuis presque deux mois en Amérique du Sud. Je suis partie de Saskatoon, je suis passée par l´Argentine pour me rendre jusqu´en Bolivie pour finir ici à Arequipa, au Pérou. Ma partenaire de voyage s´appelle Geneviève, une ancienne coloque à Ottawa, originaire de la ville de Québec.
Quand on parle du Canada aux gens d´ici, moi et Geneviève, défois on nous demande si on vient vraiment du mème pays.

C´est dròle que d´un coin du pay à l´autre, d´une communauté à l´autre, il puisse y éxister tant de différences.
Quand on voyage, on s´fait poser pleins de questions,
pis on fini par s´en poser plus.
Je me souviens qu´aux Olympiques à Vancouver, mon frère Étienne discutait de ses origines avec des Français. Ces derniers essayaient de comprendre la situation.
Ok.
Alors tu vis dans une province habitée par une majorité anglaise.
Et vous ètes une petite communauté isolée, entourée par des Anglais?
Ma foi, mais vous ètes un vrai petit village de rebels gaulois!
Des rebels, on est des rebels.
Yeahhh
Quoi de mieux que de se faire traiter de rebels.
C´est comme ennivrant.
Un vrai ego trip.
Chapeau à cornes, tout le kit.
Quoiqu´on a pas vraiment de gros bateaux...
Quand on voyage, on fait rien qu´essayer de répondre à des questions.
Ce qui est étrange par contre, c´est que c´est souvent pas nous qui les répondent.
À la question : d´où viens-tu?
J´ai appris à répondre
de Zénon.
À la question : comment c´est, ce bout du monde d´où tu viens?
J´ai appris à répondre
c`est comme vivre
parmi les nuages
dans un océan de couleur
que fait bercer le vent...
Zoé Fortier

Wednesday, July 14, 2010

Lettres de mon silo

14 juillet 2010 – Je reste assis dans la voiture. Stephan ne trouve plus son téléphone portable. Il retourne chez Jean-Sebastien et je klaxonne pour que JS sorte ouvrir la porte. Je le vois sortir, rentrer a nouveau et ressortir avec un téléphone, puis rentrer a nouveau et ressortir avec son téléphone d’une main et le cellulaire de l’autre.. il a telephone le telephone a Stephan afin de le trouver..

Le vélo est a l’arrière du camion. Dans les rues de Saskatoon, des flaques d’eau temoignent de la dernière pluie. Il pleut sans répit depuis quelques mois. Les fermiers de la province sont inquiets. Beaucoup d’entre-eux n’ont pu semer que la moitié de leurs terres… mon frère en fait partie. Il m’explique que la moitié de ses semences ne produiront rien car elles ont été noyées.

Stephan conduit sous le pont College et longe la rivière Saskatchewan jusqu’au nord de la ville ou il me depose chez Eric et Sarah. Leur chat, Jamaique, grand matou noir, me rencontre a la porte, heureux de me voir. Avant de m’endormir, je revois quelques textes dans ma tête puis je poursuis ma lecture des Lettres de mon moulin… en pensant aux Souvenirs de mon silo.

Tuesday, July 13, 2010

Avant premiere ... Routes Gallery, Harris SK


13 juillet 2010 – Le monde est petit en SK. Au magasin d’instruments, je croise un guitariste de Nipawin qui m’a déjà accompagne lors d’un spectacle a Edmonton. Lorsque je me rend a la caisse, voilà que je croise Freddie Pelletier, talentueux guitariste country dont j’ai pris quelques cours alors que j’étais artiste en résidence a Zénon Park. Freddie donnait des cours a Bellevue et se déplacait aussi a toutes les semaines jusqu'à Zénon donner des cours aux jeunes du village. Il me file un dépliant du camp de guitaristes qu'il organise chaque été a son ranch. Puis je croise Diane Lepage qui nous invite a présenter un concert le 24 juillet dans le cadre des célébrations du centenaire de St-Denis… one-stop shopping!

En soirée, le soleil se recouvre d’une couche de gris qui s’étend jusqu'à l’horizon. Véro et moi conduisons les 100 kilomètres qui séparent Saskatoon et le petit village de Harris. La salle est superbe, une ancienne église reconvertie en salle d’exposition et de concert par Liza Gareau-Tosh. C’est un vrai petit bijou. Lorsqu’on arrive, la scene est déjà garnie d’un système de son et d’eclairages et les bancs d’église placés devant. L’acoustique de la salle est excellent… pas besoin de beaucoup d’amplification. Peu de public ce soir la, juste assez pour qu’on répete nos chansons. Lorsqu’on quitte Harris, la pluie nous accompagne jusqu'à Saskatoon.

Friday, July 9, 2010

... retour a Zenon


9 juillet 2010 – Parti pour Zénon avec Véronique vers 18h30. Je joue au DJ pendant qu’elle conduit… Radio Radio, Radiohead, Daniel Lanois, Dylan, Malajube, Lanois, Marchildon, Eels, Beck, Moby… On traverse Tisdale puis on tourne sur la ‘baseline’ jusqu’au petit signe qui dit Aylsham puis on descend dans la vallée des Marchildon et la ferme paternelle. Il fait nuit déjà lorsqu’on entrepose les équipements et instruments dans notre studio, la maison-sculpture d’un de mes frères ou on répetera dans les jours a venir. Véro me laisse devant la maison et conduit en direction de la ferme de ses parents a quelques kilometres. Je rentre chez mes parents, dépose ma guitare et ma valise. Je m’assois au salon avec eux et regarde les nouvelles a la télé française, puis je jète un coup d’œil au DVD de photos qui serviront au nouveau livre d’histoire de Zenon Park et parmi lesquelles on pigera pour nos éléments vidéo. Je dors cette nuit dans un silence absolu… dans cette chambre de mon enfance aux murs tapissés de souvenirs.

Sunday, July 4, 2010

Jean-Sébastien découvre Zénon!


3 juillet 2010 - Levé tôt, multiples tournages.. au village (couvent, élévateur, rues en auto, église).. grimpé au haut d'énormes silos à grain pour capter un magnifique coucher de soleil.. un tour de sprayer avec Daniel, découverte des abeilles coupeuses, des habitants francophones de la région.. un monde à découvrir, un monde à partager.. en images..

Saturday, July 3, 2010

Un monde secret


3 juillet 2010 – Ce qui me ramène ici? J’aime les grands espaces. J’aime rentrer a la ferme, retrouver un coin de pays, un coin de terre que je connais par cœur, ou chaque arbre, chaque recoin contient un souvenir, l’étang ou j’ai appris a patiner, l’arbre ou on avait notre treehouse, l’étable ou j’ai vu des veaux venir au monde, des champs ou j’ai ramassé des roches, passé le cultivateur, les herbes, arrosé, swathé, combiné, charrié le grain en camion. Des coins secrets ou j’ai ramassé des saskatoons avec ma famille, les chemins de terre ou j’ai marché, pédalé en vélo, passé en coup de vent en moto, en pick-up ou en tracteur. Les champs de la région ou j’ai swathé la luzerne pour l’usine de Parkland. Tellement de souvenirs, tant de morceaux qui remontent a ce coin de pays, beaucoup de bons souvenirs.

Quand je parle de Zénon dans mes spectacles, les gens sont toujours émerveillés qu’il se soient passés tant de choses ici. Pourtant, j’ai rien inventé… ou si peu… Je leur dis que le pere Ares était un haltérophile – un weight lifter – et que la moitié du village l’adorait… et que l’autre moitié pouvait pas le sentir! Je leur raconte que les vieux Davis vivaient comme des hermites sur une ferme dans les bois et qu’on chuchotait qu’ils étaient des hommes instruits et de riches héritiers, qu’ils se promenaient l’hiver avec des skis de fond faits de 2X4, que c’étaient des Anglais d’Angleterre mais qu’ils parlaient bien le français. Puis je leur parle de Zénon Chamberland et de son parc de baseball qui a donné son nom au village, de Toothill avec son camion orange et de Bill Hébert qui repeinturait les plaques d’immatriculation de son camion pour ne pas avoir a payer. Oui monsieur! Des personnages comme ça, ça ne court pas les rues… sauf a Zénon!

Je leur raconte les courses folles en auto et en ski-doo, la rivalité entre Zénon Park et le village voisin d’Arborfield, les exploits de mon père au hockey, les couchers de soleil a l’horizon… écran géant… dans cette région d’Amérique encore mal connue.


...


Le monde des souvenirs est assez étrange. Il fait appel aux 5 sens. Si on a habité au village, il y a le bruit de la famille, frères et sœurs, celui des voisins, celui du train qui passe, la sirène pendant la guerre, l’odeur de luzerne du plant d’alfalfa, le son de la cloche de l’église qui annonce les funérailles, les noces. Il y a dans nos bouches le goût de nos mets préférés, les desserts de nos mères.

Dans ce silo a souvenirs, l’odeur de luzerne et du pain frais qui sort du four.
Dans ce silo a souvenirs, l’autobus jaune tous les matins, la cour d’école et les amis. On vit comme peut, on fait de notre mieux, dans notre monde secret. On marche, on court, on fait l’amour, dans notre monde secret. On cherche a comprendre, comprendre qui on est, dans notre monde secret, dans notre monde secret. Parfois on y reste toute une vie dans notre monde secret.

Friday, July 2, 2010

Chemin du retour.. et tournages Zénon


2 juillet 2010 – 6h00… l’avion roule tranquilement vers la piste de départ. Je pense au projet de spectacle qui prend forme depuis deja plusieurs mois. Il nous reste un mois pour tout mettre en place..

Le soleil brille, c’est le réveil du jour. Je suis assis près du hublot, a ma gauche, un petit garçon bavard qui bombarde son père de questions.. le père répond sans broncher, d’une patience admirable. L’avion va décoller. Je dépose mon stylo et regarde un instant le spectacle du départ par le hublot.. les turbines sont enclenchées et je me sens enfoncé dans mon siège. La vue du ciel est magnifique, ça me rappelle que Montréal est une île. Un grand navire avance lentement sur le fleuve St-Laurent. Sur l’île, je vois ou les champs en lisière ont été remplacés par des développements d’habitations clônes, des dortoirs comfos pour travailleurs de bureau et d’usines. Je réfléchit un instant au symbolisme de la cravate, objet-statut qui a traversé les âges.. cravate, nœud papillon, foulard, parure qui me semble aussi inutile que ces perruques d’homme d’autrefois.

Je place mes guitares, ma boite d’effets et ma valise sur un chariot. Quelques minutes plus tard, Stephan se gare devant l’entrée. On se rend directement au Broadway Café rencontrer Jean-Sébastien. Ca fait du bien de les voir! On discute du projet, on mange un de leurs gros déjeunés puis Steph me conduit chez mon frère qui m’a passé sa maison pendant qu’il est en voyage. Quelques heures plus tard, je conduis chez Paved Arts chercher JS et on quitte la ville en route pour Zénon Parc. Le soleil est glorieux. On s’arrête sur le bord de l’autoroute filmer le passage de nuages et les reflets du soleil. A Wakaw, on s’arrête manger des perogies et des cabbage rolls (on est en pays ukrainien!).. et on apprend que la jeune serveuse est belge! Elle s’amuse a annoncer notre commande en francais! … et juste comme on se prépare a partir, son père arrive et on embarque dans une longue et amusante discussion avec ce camionneur belge venu de Belgique il y a 10 ans s’établir en Saskatchewan, le centre du Canada, ce qui lui permet 2 arrêts chez lui par voyage trans-canadien!

Arrivé a la ferme vers 23h00. Pas beaucoup de lumieres dans la maison mais Mom & Dad écoutent la télévision au salon. Le voyage m’a permis de découvrir Jean-Sébastien que je connais depuis peu. C’est un grand sensible.. grand parce qu’il mesure 6 pieds 4 et qu’il faut faire attention dans les cadres de portes chez mes parents.. et sensible parce qu’en quittant son travail on a vu un chat se faire happer par une auto et continuer sa course folle pour traverser la rue avant de rester étendu au sol ou un couple s’est arrête pour le prendre dans leur voiture… et cette image a hanté JS pendant tout le trajet… Très sympathique mon JS. J’ai hâte de voir ce qu’on va pouvoir accomplir demain. La randonnée en auto a été superbe, les nuages gris lourds de pluie, l’éclat du soleil et en s’approchant de Zénon, les éclairs comme un feu d’artifice au loin.